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Apôtre oubliée, femme de Jésus, icône féministe : qui est Marie-Madeleine ?

Présentée tour à tour comme une sainte, une mystique, une prostituée, une coiffeuse ou une noble, nue ou austèrement habillée, pécheresse repentie voire amante du Christ : pendant des siècles, Marie de Magdala – d’où dérive le prénom Marie-Madeleine en français – a enflammé les imaginaires, abondamment exprimés à travers la littérature, la peinture, et même le cinéma. Personnage central des liturgies de Pâques en tant que témoin de la Résurrection de Jésus, elle reste largement incomprise.
« La figure de Marie de Magdala reste chargée d’émotion et de passion. Force est de reconnaître que sa complexité et les charges qu’elle a accumulées au cours des siècles ont offert un vaste panel d’interprétations souvent contradictoires », souligne ainsi Chantal Reynier, professeure d’exégèse biblique au Centre Sèvres, dans la biographie qu’elle lui consacre (Marie de Magdala, Cerf, 2022). Beaucoup de ces interprétations « l’ont défigurée en la présentant comme la femme fatale qui implique la condamnation de la chair et la nécessité de convertir l’amour humain en amour divin, ou l’humain n’a plus sa raison d’être », déplore l’exégète.
Le Monde des religions vous propose de faire le tri entre toutes ces interprétations à travers cinq questions.
Si elle est absente des Lettres de Paul de Tarse ou des Actes des Apôtres, Marie-Madeleine est citée treize fois dans les Evangiles canoniques – admis par la majorité des Eglises chrétiennes. Le texte ne nous donne que peu de détails sur sa vie. Si elle est l’une des rares femmes à être nommée pour elle-même, et non en tant que « mère de », « femme de » ou « sœur de », on ignore tout de sa situation familiale et conjugale.
Son nom aussi est énigmatique. En hébreu, « gadal », que l’on entend dans Magdala, peut signifier « grand », « tresser », « coiffer » ou « élever ». « De là, l’idée que Marie-Madeleine était une éducatrice ou une coiffeuse, et même une tisseuse de filets de pêche », analyse Chantal Reynier. En araméen, son nom pourrait également évoquer « en megaddela », qui signifie « la grande », « la bien considérée », ou « l’exaltée ». Mais l’interprétation la plus commune fait de Magdala le nom d’un bourg de pêcheurs bordant le lac de Tibériade, situé au nord-est de l’Israël actuel, d’où elle serait originaire.
L’évangéliste Luc dit qu’« étaient sortis [d’elle] sept démons » (Lc 8, 1-3), expression énigmatique qui a fait couler beaucoup d’encre. Bien que pendant longtemps, certains y ont vu la métaphore de péchés repentis, une majorité d’interprètes y voient désormais celle d’une guérison miraculeuse : les « démons », dans les Evangiles, désignent généralement un mal inconnu qui frappe la victime sans que celle-ci ait son mot à dire, et que seul le Christ est en mesure de guérir.
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